L'histoire des Thorwaler

 

 

Pour écrire l'histoire des Thorwaler (ou Hjaldinger) qui va suivre, nous avons recueilli de nombreuses sources à l'authenticité très variable. Nous avons cherché à en éliminer les éléments visiblement erronés et les exagérations. Ce ne fut dons pas une tâche aisée. La plupart de ce que nous savons vient des chants ou des sagas des Thorwaler, des sources rarement écrites. Cependant nous espérons que le résultat obtenu saura satisfaire tout le monde, de l'aventurier vagabond à l'historien averti.

 

A propos des temps les plus reculés

Ce doit être vers l'an –2800 qu'une tribu de Tulamides des courbes de la Darpat partit vers le nord-ouest. Leur périple prit fin après de longues années et ils s'installèrent dans les régions élevées au sud de la Montagne Grise. Les motifs de cette expédition, tout comme les raisons qui les ont poussés à choisir un tel endroit, ne sont pas claires. Peu à peu, les nouveaux arrivants adaptèrent leur style de vie, leurs us et coutumes à cet environnement étranger et hostile. Ce "nouveau" peuple qui naquit alors et qui n'avait plus grand chose en commun avec les Tulamides du sud est l'ancêtre de ceux que nous appelons aujourd'hui les "Norbards". Dans leur nouvelle patrie, les descendants des Tulamides vivaient d'abord de chasse à l'ours et de pêche. Progressivement, ils développèrent l'agriculture et l'élevage et construisirent aussi les premières fortifications en pierre : de hautes tours circulaires pour se réfugier en cas d'attaque de la part des Orks.

Pendant ce temps, loin à l'ouest, de l'autre côté de la mer, vivait le peuple des "Enfants d'Efferd" (appelés aussi les Hjaldinger, du nom de leur patrie Hjaldingard). Il s'agissait surtout de pêcheurs et de marchands qui naviguaient le long des côtes. Ce peuple marin et courageux habitait une petite région de ce qu'en grand continent qu'on appelle Pays de l'Or en Aventurie. Au sud de Hjaldingard, le jeune royaume de Cantera connaissait alors une formidable expansion. Il s'étendait dans toutes les directions et semblait disposer d'un nombre inépuisable de guerriers. Une confrontation avec les "Enfants d'Efferd" était inévitable.

Nous ne savons hélas presque rien de la vie quotidienne à Hjaldingard en ce temps, en effet la plus vieille saga des Thorwaler, la "Chanson de Jurga", commence avec l'avancée des légions de Cantera et la chute de Hjaldingard.

 

Quarante bateaux et 2 000 personnes

                Le combat des Hjaldinger contre les légions (qui disposaient d'une forte supériorité numérique) fut violent et causa de nombreuses pertes dans les deux camps. Finalement l'armée ennemie arriva devant Hjaldingsolm, la capitale des "Enfants d'Efferd". Le Conseil des Hjaldinger, présidé par Jurga Tjalfsdotter, prit alors une grave décision : les 2 000 habitants qui restaient commençaient à équiper 40 ottas et knorrs (bateaux de commerce ou de transport), brûlèrent leurs biens et prirent la mer en direction de l'est. Les malheureux qui ne pouvaient pas partir  (les blessés, les malades, les vieillards ou les invalides) eurent le choix entre le poignard et le poison pour se donner la mort. Quand les légions de Cantera pénétrèrent dans les ruines fumantes de Hjaldingsolm, ils ne trouvèrent pas un seul être en vie.

                La flotte de Jurga se dirigea dans un premier temps vers le nord-est pour échapper aux galères qui contrôlaient les eaux côtières. Bientôt, la faim, la soif et la maladie touchaient les fugitifs. Même Efferd, que ce peuple adorait par-dessus tout ne se montra pas clément : une forte tempête coula 3 bateaux et emporta tragiquement les 200 personnes qui se trouvaient à bord. La peur que leur inspirait le dieu de la mer ôta tout courage à l'équipage. La confiance que le peuple avait en Jurga diminua.

                Pourtant après plusieurs semaines de traversée, les Hjaldinger rencontrèrent de nombreuses baleines, conduites par un énorme cachalot blanc qui se présenta à eux comme Swafnir, le fils d'Efferd. Il les guida vers une île rocheuse très escarpée. Là, les Hjaldinger trouvèrent de l'eau fraîche, des fruits en abondance puis jurèrent à Swafnir une fidélité éternelle.

                Le voyage reprit son cours. Après des semaines interminables sur une mer hostile, ils atteignirent une île plus grande que la précédente, densément recouverte de grasses prairies et d'arbres en fleur autour desquels le gibier gambadait. L'eau, les vivres arrivaient comme par miracle sur les bateaux des Hjaldinger. Jurga se rendit sur l'île et trouva un temple en or. Elle y resta trois jours et trois nuits, le destin de l'expédition et sa propre mort lui furent dévoilés.

                Un jour de Boron, frais et brumeux, les 19 derniers bateaux et à peine 600 survivants abordèrent enfin une côte enneigée du nord de l'Aventurie. Ils dressèrent leur campement d'hiver et donnèrent le nom d'Olaport à leur premier village.

                Un hiver rigoureux s'ensuivit et décima encore la moitié des derniers Hjaldinger. Parmi les victimes figurait Jurga en personne, morte la nuit du milieu de l'hiver d'une année aujourd'hui inconnue (environ –2620).

 

 

Les Hjaldinger arrivent !

                Le nord-ouest resta tranquille pendant longtemps. On suppose que les Hjaldinger ont fraternisé avec les Norbards qui habitaient ici, ou du moins ont passé des accords avec eux. Les premières grandes villes des Hjaldinger étaient Olaport, Prem, Vidsand, c'est-à-dire des localités le long de la côte.

                En –1861, une expédition conduite par l'amiral Sanin atteignit l'embouchure du Bodir, à un endroit appelé Torwjald, et se heurta à l'hostilité de ses habitants. Dans l'Ancien Empire, le nom de Torwjalder ou Thorwaler devint alors synonyme de brusquerie et de grossièreté, toutes les expéditions ou les ambassades envoyées là-bas revinrent bredouilles.

                En –1792, par un frais matin du mois de Phex, trois "bateaux-dragons" atteignirent la petite ville de Grangor. Quand ils la quittèrent trois jours plus tard, il ne restait plus que des ruines fumantes. Les Hjaldinger (ou pirates de Thorwal, comme ils se font désormais appeler) ont compris qui se cachaient les habitants de la côte sud : il s'agissait en fait de colons venus de l'Imperium, le vieil ennemi du Pays de l'Or.

                Havena, Grangor, Kuslik, Neetha, Mengbilla : les siècles suivants, les villes du sud firent fréquemment l'objet d'attaques. L'expédition la plus audacieuse aboutit au sac de Bosparan, le 9/IV de l'an –1324, 16 bateaux remontèrent le Yaquir, occupèrent Bosparan-Nord (là où se trouve aujourd'hui Vinsalt) et brûlèrent tous les ponts sur le fleuve. Ils restèrent près d'une semaine dans la ville et la pillèrent jusqu'à la dernière pièce de cuivre. Quand une armée de Kuslik se rendit sur les lieux, les Thorwaler se retirèrent.

                Vers la fin des "Temps Sombres", on rapporte que des ottas firent pour la 1e fois escale dans des villes côtières avec à leur bord des marchandises. Quand une ville était trop grande ou alors trop solidement fortifiée pour pouvoir être mise à sac, les Thowaler débarquaient pour vendre des étoffes ou de l'eau-de-vie. Quelques semaines après, les bateaux pouvaient revenir, soit avec d'autres marchandises, soit avec des guerriers pour piller la ville.

                Au nord, le développement fut assez pacifique. Des capitaines thowallois et olportais ont réussi à contourner la pointe nord de l'Aventurie et arrivèrent au "bout du monde" : en –1588, Olvir découvrit l'embouchure de la Letta et l'Epée d'Airain. Ce faisant, les Hjaldinger installèrent des colonies : Hjalmeford (fondée en –1601 sur la Kvill) et Tjolmar (fondée en –1510 sur la Svellt) furent un temps les plus prospères. Ici se rencontraient des Thowaler, des Nivésiens et des Norbards, les premiers contacts avec le peuple très mal connu des Elfes furent également noués. Même des "coureurs des bois", des poseurs de pièges et des colons du sud y furent bien accueillis. Cependant l'âge d'or de Hjalmeford fut assez bref, la ville fut pillée et rançonnée à plusieurs reprises par les Orks (elle fut notamment réduite en cendres en –1147) avant d'être finalement abandonnée. Ce n'est que bien des années plus tard que Riva fut fondée.

                En –993, la chute de Bosparan eut lieu dans le sud. Des réfugiés quittaient Fertilia dans toutes les directions. Certains cherchaient même refuge à Thorwal. Thurske, le hetmann principal de cette époque, leur permit finalement de s'installer dans les régions élevées du pays. Progressivement ces arrivants se mêlèrent à la population. Un peuple à part entière, composé surtout de coriaces paysans et "coureurs des bois", naquit de cette union. Imitant ce qui s'était passé plusieurs siècles auparavant, il se mit à fonder de nouvelles colonies (parmi elles, Gwaryd, l'actuelle ville de Waskir) et certains habitants partirent chercher fortune dans des pays étrangers. C'est pourquoi nombreux sont les habitants d'Albernie à pouvoir faire remonter leurs origines jusqu'aux régions élevées au sud de la Montagne Grise.

 

Sous l'étendard du soleil

                Les années suivantes, les affrontements avec des unités du Nouvel Empire, alors en plein essor,  se firent de plus en plus nombreux et purent aussi bien se dérouler sur terre que sur mer. Les combats navals tournèrent le plus souvent à l'avantage des Thorwaler. Mais avec la mise en place de la Flotte Impériale de l'Ouest, les attaques des Thorwaler sur l'Albernie diminuèrent rapidement. Puisqu'il ne restait plus de richesse à soutirer dans l'Ancien Empire, les Thorwaler, dirigés par le hetmann Isleif se consacrèrent de nouveau au commerce (cette façon bien particulière de commercer a déjà été décrite plus haut) le long de la côte nord.

                Trente ottas étaient dans le port de Salza quand l'Empire lança une attaque inattendue : le matin du 27/IX/-702, 71 galères de différents types (c'est-à-dire l'ensemble de la Flotte de l'Ouest) apparurent à l'horizon. La bataille dura jusque tard dans la nuit et tourna à l'avantage des impériaux, les canons modernes montés sur les galères n'étaient pour rien dans leur succès. Les Thorwaler perdirent 24 ottas et les impériaux 27 galères. L'amiral Vikos mit immédiatement le cap sur le nord et s'empara facilement de la ville de Thorwal, non préparée à cette intrusion.

                Trois ans suffirent pour conquérir les autres territoires thorwalques. Seules Olport et les îles conservaient leur liberté. A dire vrai une forteresse a été édifiée à Olport, mais par un concours de circonstances (ou grâce à une intervention d'Efferd), elle ne fut jamais occupée par les troupes impériales.

                A Thorwal, le hetmann fut remplacé par un commandeur (le 1er fut Ozir de Winhall en –701) et on entreprit de construire un château fort. A partir de -695, les premières colonies furent fondées dans la vallée du Bodir, elles furent l'œuvre commune de Thorwaler et d'habitants de l'Empire. Ces villages furent fortifiés à cause de la menace orke. Au cours de cette entreprise, il exista une véritable solidarité entre les gens du nord et les colons de l'Empire.

                L'arrivée des théocrates sur le trône de Gareth amena une série de changements. En –614, des gouverneurs furent installés à Myrburg (gouvernement de Bodironie) et à Olport. L'augmentation des impôts, l'interdiction de Swafnir et l'introduction forcée du culte de Praios conduisit les Thorwaler à se soulever contre les occupants, l'image des envahisseurs orlandais détestés restait dans les esprits. Les timides frictions du début se transformèrent vite en guérilla et les deux camps se livrèrent une lutte sans merci. Alors que les Thorwallois pourtant résolus n'ont pas pu chasser la "Légion du Soleil", au nord, la flamme de la liberté ne s'était pas encore éteinte. Entre –580 et –563, des ottas toujours plus nombreuses partaient du port libre d'Olport et avançaient dans le golfe de Prem pour couper le ravitaillement des légions. Le 16/XII/-562, une importante formation de la Flotte Impériale de Salza prit la mer pour combattre les navires rebelles. Les impériaux firent alors face à 28 ottas (ils s'attendaient à en affronter une douzaine), qui embusquées dans une crique toute proche attendaient impatiemment le combat. Cette fois, les gens du nord échappèrent aux salves des canons et se mirent rapidement en position d'abordage. Au bout de sept heures, les 19 galères n'étaient plus que débris à la dérive. A l'instar de l'amiral Vikos par le passé, la hetfrau olportaise Thorfinna dirigea ses bateaux vers le nord et parvint très rapidement à Thorwal. Les batailles suivantes qui se déroulèrent pendant les jours du Sans Nom furent un bain de sang. Aucun soldat de la Légion du Soleil ne fut laissé en vie par les révoltés. Toute la parenté des serviteurs honnis de Praios et de leurs sbires, enfants et vieillards compris, furent massacrés ou noyés. Quand la tête du gouverneur de Bodironie, déjà à moitié décomposée, arriva à Gareth, le théocrate s'étrangla de colère et manqua de succomber à une crise cardiaque. Les combats durèrent encore quelques années mais privés de flotte puissante et des unités de la Légion du Soleil, les Garethais ne pouvaient plus espérer la victoire.

 

La "grande peste"

                Thorwal avait reconquis sa liberté. A Prem et à Waskir, les gouverneurs détestés furent également chassés et le commerce avec Olport avait repris. Les 150 années suivantes, la navigation se développa à nouveau sous le commandement de hetleute principaux comme Ragnar, Simjara et Hjore. Les ottas se rendirent de nouveau escale à Riva, où elles étaient bien vues car elles y apportaient des nouvelles du sud, l'Empire de Rohal. L'immensité de l'Océan d'Ifirn fut explorée pour retrouver le "pilier d'Ifirn" (le pôle nord ?) mais en vain. Les actes de piraterie étaient rares en cette période, seule Al'Anfa détestée en raison du commerce des esclaves, fit l'objet de plusieurs attaques. La culture et les sciences connurent également un renouveau, l'échange de connaissances avec l'Empire fut renforcé sous le règne de Rohal. La fondation officielle des académies de Thorwal ("l'Ecole de la Lucidité") et d'Olport (la "Halle du Vent") datent également de cette époque.

                Ces deux académies ne prirent par ailleurs pas part aux "guerres des mages" après la disparition de Rohal. Ces conflits annonçaient pourtant le début du déclin de la civilisation impériale, du moins au nord : les villages de Bodirsford, Svirna et Dragsjelme (qui dataient du temps de la colonisation de la vallée du Bodir) furent attaqués et incendiés par des tribus nomades d'Orks en –395. L'hiver de la même année, Angbodirtal tomba également et au mois de Rondra de l'année –394, les premières hordes orkes se rassemblaient devant Thorwal. Gênés par le poids de leur butin et par leur escorte, les Orks ont pu cependant être repoussés. En même temps, de l'autre côté du Orkland, d'immenses troupes orkes s'élançaient et s'enfonçaient à l'intérieur de l'Empire. Après avoir été défaits, ils purent cependant remporter une dernière grande victoire en –392 : environ 5 000 d'entre eux se ruèrent sur toutes les localités à l'embouchure du Bodir. Encore une fois, les Orks furent battus mais les derniers combats eurent lieu à l'intérieur des murs de la ville. La hetfrau Hjalka qui commandait les défenseurs et avec elle, près de 1 000 hommes et femmes perdirent la vie. Dans la rue, les cadavres s'amoncelaient, bien trop nombreux pour être enterrés dans les règles…

                Très vite les cas de maladie s'accumulaient, ce qui était presque du jamais chez les Thorwaler jusqu'à cette date. Au début il n'y avait que quelques cas isolés de "fièvre des champs de bataille" ou de gale orke. Après un hiver de la faim et un mois de Peraine  pluvieux en -390, la situation s'aggrava. Le nombre des personnes alitées, atteintes de la "morve sanglante" et du "souffle bleu" croissait rapidement. Aucun magicien, aucun talisman, aucune prière ne put empêcher l'épidémie de gagner du terrain. Au mois de Praios –388, il n'y avait plus que 1 500 habitants à Thorwal. Même la fuite par la mer n'arrêta pas la propagation de la maladie : pire, les maladies furent ainsi transportées vers Olport, Salza et Prem. En –386, presque le tiers de la population des villes côtières comprises entre Olport et Salza fut décimé. La désolation enveloppa comme un linceul le pays compris entre l'Ingval et la Gjalska… Seul l'arrière-pays fut épargné.

                Les Thorwaler nous ont transmis peu de choses sur les trois siècles qui suivirent, on peut cependant déduire d'après les chants des scaldes que la construction du port d'hiver et du canal daterait de cette période. De petits ottajaskos et clans parlaient également de chemins en mauvais état et de monstruosités errant dans les marécages. Dans les îles régnaient des druides sinistres et des proscrits sanguinaires. La vallée du Bodir était laissée à l'abandon, il n'y a qu'à Myrburg que des événements historiques se jouèrent, événements qui n'eurent à Thorwal pas plus d'écho qu'une simple rumeur. En –369, Myrburg, assiégée près de six mois par les Orks, fut sauvée par un Géant mangeur d'Orks. En –196, Jirtan Orbas atteignit la ville avec 20 fidèles, grâce à leur énergie un assaut des Zholochai put être repoussé ; peu de temps après la ville fut rebaptisée Phexcaer.

 

Les "bateux-dragons" devant Chorhop

                Le 19/II/-87, les Thorwaler sont de nouveau aperçus au sud de Nostria.

                Après un court arrêt à Havena, six ottas prirent la mer vers le sud. Le 7/III, ils débarquèrent à Brabak. Entre-temps, ils avaient pillé sous la conduite de Hyggelik le "Grand" Chorhop et Mengbilla, arraché des trésors d'une valeur de 50 000 ducats et massacré plus de mille personnes.

                Un an plus tard, la hetfrau Olverja Kendrifari soumit une proposition au roi de Brabak accablé par les dettes, Ariakon III : elle promit d'épargner la ville et de lui donner une partie de son trésor si Brabak renonçait à l'avenir à l'esclavage et si le roi mettait à la disposition des Thorwaler un port sûr, exempt de droits de douanes et de taxes. Cet accord fut encore renégocié par l'actuel maître de Brabak, le roi Mizirion III. Les années suivantes, l'ottajasko de la "Raie bleue" devint la terreur de la Mer des Perles avant d'être accrochée et détruite devant Selem par 14 galères d'Al'Anfa. Seul un navire put s'enfuir en prenant la haute mer et rentrer à Brabak. Ce qui restait de la "Raie bleue" formait ensuite l'essentiel des marins mercenaires de Brabak, qui sous le commandement de Torgal "Marteau au poing" jouèrent un rôle décisif dans la victoire de la Ligue des Etats Libres lors de la bataille navale de Charypso en –46.

                A l'ouest, les actes de pillage continuaient. Les ports de l'Archipel des Cyclopes et les villes de Chorhop, Drôl et Mengbilla eurent notamment à déplorer des attaques fréquentes. Ce n'est qu'en –39, quand il n'y avait plus un ducat à se mettre sous la dent dans ces villes, que les pillages cessèrent. Encore aujourd'hui, le seul fait de crier "les Thorwaler sont là !" suffirait à provoquer la panique dans la population de Drôl. Depuis les Thorwaler n'ont pas rétabli de liaisons commerciales avec ces villes, préférant fonder leurs propres colonies sur la côte, à partir desquelles ils échangeaient avec la population locale et représentaient à l'occasion un danger pour la navigation. Avant tout les ottaskin près de Drôl et au nord de Brabak étaient craints pour leurs pirates.

                Le hetmann principal des Thorwaler, de –88 à –61, Hardred Bjarnison de l'otta "espadon" dirigea les affaires d'une main de fer, tant sur le plan intérieur qu'extérieur. Il réussit un moment à donner à l'ensemble des clans et des jarle l'aspect d'une nation homogène. De même il négocia l'établissement de frontières fixes avec la Fédération de la Svellt (en –72) et les Orks (en –69). Les relations, traditionnellement au beau fixe, avec la Bornlande se dégradèrent subitement quand le pirate de Thorwal, Atmaskot le "buveur de sang", s'attaqua sans hésitation au port de Festum et occupa l'île des entrepôts. Festum réagit aussitôt après en déclenchant en –65 la "chasse aux dragons" contre tous les Thorwaler de la Mer des Perles, cette campagne ne s'acheva que récemment.

                La tentative de Hardred de mettre l'Albernie à genoux échoua quand la flottille des Thorwaler dut essuyer une terrible défaite devant le port de guerre de Harben. Le hetmann fut contraint de prendre part à un accord mutuel de non-agression.

                Avec l'ouverture des ports d'Albernie, l'Empire découvrit peu à peu une nouvelle forme de mauvaise habitude des Thorwaler : le jeu d'imman. Là où ont échoué les rugueux hommes et femmes de Hardred, le frêne et le liège ont réussi à conquérir l'Albernie en l'espace de deux décennies.

                La fille de Hardred, Eilif, ne réussit pas à préserver l'héritage de son père. Après huit ans comme hetfrau principale, elle dut se résigner à voir le Hjalding devenir une institution solide. Mais une coalition de quelques ottajaskos, jarle, clans et communautés villageoises eut raison d'elle. En –53, Eilif fut révoquée et remplacée par Swafnild Thorfinnsdottir, la seule candidate qui fit l'unanimité au Hjalding. Ce qui ne devait être qu'une solution transitoire se révéla être la plus longue période avec un gouvernement centralisé. Si il y eut chez les Thorwaler un homme ou une femme qui avait le sens de la politique, et qui pouvait rivaliser avec un diplomate de Gareth ou Vinsalt, c'était bien Swafnild. Bien que simple fille de marchand d'Olport, et sans appartenir à une otta, elle réussit à concilier les différentes fractions et à apporter une période de stabilité. En outre, Swafnild fut connue en maints endroits comme la "reine des mercenaires", c'est sous son égide que les premiers traités sur la "location" d'ottajaskos entières à des nations amies furent menés à bien.

Un matin, la couche de la hetfrau fut trouvée tachée de sang, Swafnild avait disparu et personne n'a plus jamais entendu parler d'elle. De même on ne réussit pas à tirer au clair l'énigme de sa disparition.

Il a fallu deux ans pour que les Thorwaler s'accordent sur le choix d'une nouvelle hetfrau principale : Garhelt, déjà hetfrau de deux ottas, "les cavaliers de l'écume" et la "fosse du vent". En 13, Garhelt fut la première à réussir à conclure un traité avec le Nouvel Empire. Pendant l'exercice de son pouvoir, Thorwal est aussi devenu pour la 1e fois un élément de poids dans la politique extérieure des grands empires. Les clans et les ottajaskos étaient plus solidaires que jamais, de plus leurs attaques diminuèrent. Pourtant la politique prudente de Garhelt fut troublée de manière sensible par le hetmann Eldgrimm "le Long" qui en l'an 8, à la suite d'un pari conquit sans hésitation la petite ville de Kendrar et déplaça ainsi la frontière sud du territoire thorwalque jusqu'à l'Ingval. Les protestations énergiques de Gareth n'eurent pas beaucoup d'effets (l'empereur Hal se trouvait à ce moment-là à Maraskan) et les menaces de guerre de la part de la Nostrie ne furent pas prises au sérieux.

A l'âge de 74 ans, Garhelt mourut le 27/III/15 après avoir gouverné 22 ans. Jusque-là personne n'a osé contester à son fils Tronde la dignité de hetmann principal. Tronde passe pour un individu farouche, qui a déjà parcouru toute l'Aventurie et semble être aussi un fin politicien. Les années à venir montreront s'il peut conduire Thorwal à jouer un rôle important…

 

Un peu de vocabulaire thorwalque

 

Hetfrau (féminin) ou hetmann (masculin) : chef des Thorwaler à l'échelle d'un clan, d'une otta ou d'un village.

Hetleute (pluriel) : chefs désignés par une ottajasko ou un village, qui ont droit de vie ou de mort, porte-parole de leur communauté devant le Hjalding et négocient avec les autres clans. Les hetleute sont généralement élus à vie, ont des pouvoirs considérables mais peuvent être révoqués par leur ottajasko.

Hetfrau ou hetmann des hetleute (appelé-e aussi hetfrau ou hetmann principal-e) : dans la file des hetleute, principal dirigeant à vie des Thorwaler investi par le Hjalding, et dont la fonction se rapproche un peu de celle du "noble-maréchal" en Bornlande. L'actuel hetmann des hetleute est Tronde Torbensson.

Hjalding : assemblée réunie deux fois par an des hetleute, jarls, représentants des clans et doyens du village pour rendre la justice, se répartir le pays et conseiller le hetmann des hetleute. Le Hjalding a le droit de révoquer les hetleute principaux en raison d'une incapacité évidente (même si cela ne s'est produit que rarement).

Jarl : personnage important élu dans plusieurs villages thorwalques (plus rarement dans les ottajaskos), il a des fonctions de juge de paix, de commandant en chef en cas de guerre et de représentant du village au Hjalding. Les jarle sont souvent des scaldes et descendent de familles de scaldes et ont ainsi une solide connaissance du  droit thorwalque.

Knorr : bateau de commerce ou de transport, plus large et plus massive que l'otta classique et supporte un peu moins bien la mer forte, elle ne dispose que de quelques rames, elle a une contenance plus importante pour les marchandises.

Otta (ou "bateau-dragon" chez les non-Thorwaler): long bateau à tête de dragon des Thorwaler. En principe, un grand bateau à rames, elle dispose seulement d'un pont continu sans cabine. Elle peut avancer par rame ou par voile. Le seul mât est rabattable et porte sur sa vergue une voile carrée. La forme d'une otta est très élancée, son tirant d'eau est faible tout comme sa capacité de chargement. Elle est rapide, extrêmement mobile et parfaitement adaptée à la haute mer, elle est tout sauf confortable.

Ottajasko : communauté de gens de la mer chez les Thorwaler, formée par tous les membres de l'équipage et les mineurs d'une ou plusieurs ottas, remplace le clan pour la partie naviguante des Thorwaler.

Ottaskin : forme de colonie thorwalque où les jolskrmi (maisons tout en longueur des Thorwaler) d'une ottajasko sont entourées d'une palissade.

Scaldes : bardes et conteurs thorwalques, qui en raison de leurs connaissances historiques, ont souvent la charge de l'éducation des jeunes et sont souvent consultés sur les problèmes de droit. Dans les zones de civilisation thorwalque, ils sont protégés par rapport aux autorités.

Thorwalque : langue des Thorwaler, dérivée de l'ancien orlandais et apparentée au garethais.

 

Quelques couplets de la "Chanson de Jurga"

 

 

I-

Je vais vous chanter la vie de Jurga Tjalfsdotter,

Vous parler du Pays de l'Or, terre de nos Ancêtres,

De Hjaldingard, la patrie que nous perdîmes,

Je vous offre l'héritage de Jurga,

 

II-

Après des combats sur terre et sur nos ottas,

Après la traversée éprouvante de l'Océan d'Ifirn,

Tu nous a libérés de la détresse et de la douleur,

Nous t'en remercions, Jurga,

 

XII-

Les légions ennemies marchaient vers le nord,

Ravageaient nos terres par le feu et la guerre,

Et même en remportant quelques victoires,

Notre armée se réduisait de jour en jour,

XIII-

Nous combattant à coups de haches et de lances,

L'ennemi se tenait sous nos murs,

"Prier, nous lamenter sont choses vaines,

Nous devons prendre la mer", disait Jurga,

 

XIV-

Nous partîmes vers l'endroit où le soleil,

Nous salue le matin, y chercher la liberté,

Pour chaque homme et chaque femme,

Seul Efferd pouvait nous y conduire en sûreté,

 

XV-

Jurga fit équiper quarante dragons,

Et des knorrs chargés jusqu'au mât,

Plus de deux firent leurs adieux au pays

Puis partirent vers l'est,

XXVI-

Avec des chants, nous voulons remercier les héros,

Qui tombèrent en combattant l'ennemi,

Qui se battirent avec vaillance sur terre et sur mer,

Par nos chants nous les rendons immortels,

 

XXXII-

Je n'oublierai jamais cette image,

Du soleil qui surgissait des flots,

Et les cheveux fous de Jurga qui volaient au vent,

Brillaient de la même couleur d'or,

 

XXXIX-

Après des semaines, quelqu'un cria qu'il vit un îlot,

Avec des arbres en fleurs surgissant du sable blanc,

Une salle en or se trouvait au milieu,

Près du rivage nous saluait Swafnir,

 

LXXXV-

Un pays d'hiver, près de montagnes hostiles,

Des vallées et des rivières gelées,

O quelle fin pour ce voyage terrible,

L'œil ne trouvait ici aucun réconfort,

 

XC-

La nuit du milieu de l'hiver à Olaport,

Jurga Tjalfsdotter prit la hache et le "thin"

Pour accomplir la prédiction,

Pour obéir à la parole de Swafnir,

 

XCI-

Elle convoqua tous les hommes et femmes,

Pour entendre le destin révélé par les dieux,

La parole en laquelle nous plaçons notre confiance,

Et que même enfants et petits-enfants prennent à cœur,

 

XCII-

Vous devez écouter le hetmann ou la hetfrau,

Ils gouvernent, jugent, vous guident pour battre l'ennemi,

Aussi longtemps que leur tête peut porter cette responsabilité,

Et que leur bras peut guider le dragon,

 

CIV-

Ils n'étaient plus que trois cents en vie,

Mais Jurga fut triomphante jusqu'à sa mort,

Rouge comme le sang le soleil se dirige vers le sud,

Et nous indique notre quête de demain !

 

 

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